OEUVRE - "Lamentation" de Martha Graham

Dossier - Lamentation de Martha Graham
En quoi l’œuvre «Lamentation» de Martha Graham est-elle une œuvre engagée?

I. L’expression du deuil universel comme engagement contre l’indifférence


L’une des premières dimensions d’engagement dans l’œuvre «Lamentation» de Martha Graham réside dans sa capacité à universaliser l’expérience du deuil et de la souffrance. À une époque, les années 1930, marquée par de grands bouleversements économiques et sociaux, notamment la Grande Dépression, Graham choisit de mettre en lumière les émotions les plus intimes et universelles. En incarnant le deuil non pas comme une expérience individuelle mais comme un sentiment partagé, «Lamentation» se pose en vecteur d’empathie et de solidarité. Cette œuvre engage le spectateur à reconnaître et partager la souffrance d’autrui, s’opposant ainsi à l’indifférence qui peut prévaloir en temps de crise.


Analyse : Dans «Lamentation», Graham utilise un costume tubulaire, qui restreint ses mouvements tout en amplifiant chaque geste. Ce choix esthétique et chorégraphique symbolise la prison émotionnelle que représente le deuil. Les mouvements contenus mais intenses expriment une lutte intérieure, une souffrance qui ne trouve pas d’échappatoire. Cette représentation visuelle et kinesthésique du deuil interpelle directement le spectateur, le confrontant à l’universalité de la douleur humaine.

I. Une prise de position féministe par le biais de la danse




La deuxième dimension d’engagement dans «Lamentation» peut être perçue à travers le prisme du féminisme. Martha Graham, figure emblématique de la danse moderne, utilise son art pour remettre en question les rôles traditionnellement assignés aux femmes dans la société et dans le monde de la danse. En choisissant de se produire seule sur scène, Graham revendique l’autonomie et la force des femmes, défiant ainsi les normes et les attentes de son époque où la danse était souvent un domaine dominé par les figures masculines.


Analyse : Le solo «Lamentation» est non seulement une performance physique mais aussi un acte d’affirmation féminine. En exprimant des émotions profondes et complexes à travers son corps, Graham démontre la puissance et la profondeur des expériences féminines. Elle refuse de se conformer à une représentation idéalisée ou passive des femmes dans l’art, choisissant plutôt de montrer une réalité brute et émotionnellement chargée.



III. La danse comme langage universel pour transcender les barrières culturelles


Enfin, «Lamentation» s’engage à promouvoir la danse comme un langage universel capable de transcender les frontières culturelles et linguistiques. Dans un contexte international tendu, précédant la Seconde Guerre mondiale, Graham démontre que l’art peut servir de pont entre les peuples, favorisant la compréhension et l’empathie au-delà des différences. En choisissant une musique du compositeur hongrois Zoltán Kodály, elle souligne également son désir d’intégrer des influences diverses dans son travail, enrichissant ainsi le dialogue interculturel.


Analyse : La combinaison de la musique de Kodály et de la chorégraphie innovante de Graham crée une expérience immersive qui dépasse les barrières linguistiques et culturelles. L’œuvre parle directement à l’émotionnel, permettant à chacun, quelle que soit son origine, de se reconnaître dans l’expression universelle du deuil et de la résilience humaine.

En conclusion, «Lamentation» de Martha Graham est une œuvre profondément engagée qui, par son exploration du deuil, sa revendication féministe et son appel à l’universalité, offre une réflexion sur la condition humaine. Elle démontre le pouvoir de la danse non seulement comme forme d’art mais aussi comme moyen d’expression politique et sociale.

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