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Terminale

Regard critique

Comment et pourquoi le chorégraphe utilise-t-il sa création comme un miroir critique du monde qui l’entoure?


 “L’artiste, au même titre que le penseur, s’engage et se devient dans son œuvre.

Le mythe de Sisyphe (1942) d’Albert Camus

Analyse du sujet

Les thèmes du sujet :

Le sujet porte sur l’engagement politique et social des chorégraphes contemporains utilisent souvent leur art pour commenter et critiquer les aspects de la société qui les entourent. Ils abordent des thèmes tels que la politique, l’identité, la justice sociale, l’environnement, et les dynamiques de pouvoir. Les œuvres de danse deviennent ainsi des réflexions sur l’humanité et ses enjeux.


Définition :


Chorégraphe : un créateur de danses, qui conçoit et organise les mouvements et les motifs de la danse.


Regard critique : une observation ou une analyse qui vise à évaluer et à remettre en question les aspects de la société.


Monde : ici, le terme se réfère à la société humaine et à ses diverses cultures et structures.

Questionnement :


De quelle manière les chorégraphes utilisent-ils la danse pour refléter les problématiques sociales actuelles ?

Comment la danse peut-elle servir de médium pour la critique politique ?

Quel est l’impact de l’engagement social et culturel des chorégraphes sur le public ?

Comment les chorégraphes intègrent-ils des éléments de leur propre identité dans leur critique du monde ?

De quelle façon les chorégraphes contemporains renouvellent-ils l’art de la danse en tant que forme d’expression critique ?

Problématique :

Comment et pourquoi le chorégraphe utilise-t-il sa création comme un miroir critique du monde qui l’entoure?

Plan

1. La danse comme outil de critique sociale et politique

Analyse de «Nomad» de Sidi Larbi Cherkaoui comme exploration de l’identité culturelle dans un monde globalisé.

Discussion sur «Le No Manifesto» de Yvonne Rainer et les actions du Judson Dance Theatre en tant que remise en question des conventions de la danse.


2. L’expression des identités et des minorités à travers le mouvement

Étude de «Ceremony of Us» d’Anna Halprin comme tentative de guérison des divisions raciales par la collaboration artistique.

Examen du krump, une danse née des rues de Los Angeles, comme expression puissante des expériences des communautés marginalisées.


3. La danse comme miroir des dynamiques environnementales et personnelles

Analyse de «Umwelt» de Maguy Marin, reflétant les préoccupations environnementales et les cycles répétitifs de la vie moderne.

Exploration de «Ligne de crête» également de Maguy Marin, comme représentation des luttes personnelles et collectives.

Activité 1 - Improvisations collectives multiples par le biais de jeux théâtraux et corporels

Consignes

À partir des ateliers explorés en première et terminale, ainsi que des œuvres étudiées dans le cadre du chapitre « La danse, art engagé ? » , engagez une réflexion et une mise en pratique autour de l'engagement en danse :

  1. Identifier les éléments qui caractérisent l'art engagé dans une œuvre chorégraphique et/ou chez un chorégraphe, à la fois par l'analyse orale et par l'exploration corporelle.
  2. Exprimez vos goûts personnels et les thématiques qui vous touchent, en les mettant en lien avec votre propre rapport à l'engagement artistique, à l'oral et dans le corps. Complétez le tableau proposé.
  3. S'approprier un cadre de référence et créer un solo d'une minute, en trouvant un équilibre entre fidélité à l'œuvre ou à l'artiste de référence et interprétation personnelle , afin d'éviter à la fois le plagiat et une réinterprétation trop éloignée. Complétez le tableau proposé.


Les artistes de référence pour cette période:

Maguy Marin

Léonie MBaki

Anna Halprin

Yvon Rainer




Les pièces de référence

Nomad de Cherkaoui

Ceremony of us de Anna Halprin

Planetary dance d’Anna Halprin 

No manifesto d’Yvonne Rainer

Umwelt de Maguy Marin 

Ligne de crête de Maguy Marin 

No manifesto, Yvonne Rainer, 1965

Ceremony of us, 1969

Planetary dance, Anna Halprin, 1978

Maguy Marin, Umwelt, 2004

Maguy Marin, Ligne de crête, 2018

Nomad, Charkaoui, 2018

No manifesto, Yvonne Rainer, 1965 Ceremony of us, 1969 Planetary dance, Anna Halprin, 1978 Maguy Marin, Umwelt, 2004 Maguy Marin, Ligne de crête, 2018 Nomad, Charkaoui, 2018
Contexte social
Axes d’engagements
Principes de création
mon «recyclage»

L'art engagé

Le monde de la danse contemporaine offre un prisme fascinant pour explorer l’engagement critique des chorégraphes face à la société. Ces artistes, par le mouvement et la performance, posent un regard souvent incisif sur les enjeux sociaux, politiques et culturels de leur époque. Dans ce commentaire, nous allons nous pencher sur trois axes d’engagement significatifs, en les replaçant dans le contexte sociétal et en analysant des œuvres chorégraphiques emblématiques.

Axe 1: La critique sociale et politique à travers la danse

Les chorégraphes, comme d’autres artistes, sont souvent des témoins privilégiés de leur temps. Ils réagissent aux tensions et aux dysfonctionnements de la société par la création d’œuvres qui reflètent et questionnent ces problématiques. Par exemple, Maguy Marin, dans ses pièces «Umwelt» et «Ligne de crête», utilise la répétition et l’isolement des corps pour symboliser les rouages aliénants de la société moderne. Dans «Umwelt», les danseurs évoluent dans un espace scénique où les entrées et les sorties se succèdent sans fin, métaphore d’une société où l’individu est constamment confronté à des cycles répétitifs qui semblent inévitables. «Ligne de crête» poursuit cette réflexion en mettant en scène des corps en lutte, évoquant les résistances face aux pressions sociales.


Axe 2: L’expression des identités et des minorités

La danse contemporaine a également servi de plateforme pour l’expression des identités et des voix des minorités. Anna Halprin, avec «Ceremony of Us», a cherché à créer un dialogue entre des danseurs blancs et noirs à une époque de fortes tensions raciales aux États-Unis. Cette œuvre a été une tentative de guérison sociale par le biais de l’art, en invitant les participants à explorer et partager leurs expériences et leurs différences culturelles à travers le mouvement. De même, le krump est une forme de danse née dans les rues de Los Angeles qui permet aux jeunes issus de communautés marginalisées d’exprimer leur frustration, leur colère et leur désir de changement. Ce style de danse intense et énergique est une forme puissante d’expression personnelle et de résistance culturelle.


Axe 3: La remise en question des normes esthétiques et des conventions

Yvonne Rainer, avec son «No Manifesto», a radicalement remis en question les normes esthétiques de la danse classique et moderne. En rejetant l’exotisme, le spectacle et la virtuosité technique au profit de mouvements du quotidien et d’une présence scénique dénuée d’artifice, Rainer a ouvert la voie à une forme de danse plus démocratique et accessible. De même, le Judson Dance Theatre a exploré de nouveaux territoires en intégrant des éléments d’improvisation et en s’affranchissant des hiérarchies traditionnelles du ballet. Ces démarches ont contribué à démocratiser la danse et à la rendre plus inclusive.


Dans chaque axe, ces chorégraphes posent un regard critique sur le monde qui les entoure en utilisant le langage corporel pour communiquer des idées complexes. Ils démontrent que la danse peut être un outil puissant pour engager le dialogue social, questionner les normes et inspirer le changement. Ces œuvres chorégraphiques ne sont pas seulement des performances artistiques; elles sont des actes militants qui contribuent au débat public et à l’évolution de la conscience collective.

Marina Abramovic, Rhythm 0, 1974

La danse comme outil de critique sociale et politique

Analyse de «Nomad» de Sidi Larbi Cherkaoui comme exploration de l’identité culturelle dans un monde globalisé. 

La danse, depuis toujours, est un miroir de la société, reflétant ses tensions, ses dynamiques et ses aspirations. En tant qu’outil de critique sociale et politique, la danse transcende le simple divertissement pour devenir un acte de communication puissant. C’est dans ce contexte que s’inscrit «NOMAD» de Sidi Larbi Cherkaoui, une œuvre qui interroge l’identité culturelle dans un monde globalisé.

Axe d’engagement 1: La danse comme vecteur d’identité multiculturelle

Sidi Larbi Cherkaoui, à travers «NOMAD», met en lumière la complexité de l’identité à l’ère de la mondialisation. Il se sert de la danse pour exprimer son propre métissage culturel – marocain, belge, flamand – et par là, illustre la diversité des identités qui coexistent au sein d’une même société. Dans une chorégraphie où les frontières entre les cultures s’estompent, Cherkaoui présente un monde où l’hybridité devient la norme. Les mouvements des danseurs, inspirés de traditions diverses, s’entremêlent pour créer un langage universel qui célèbre le métissage comme une richesse plutôt qu’une source de conflit.

Analyse de la chorégraphie «NOMAD»
Dans «NOMAD», chaque geste et chaque configuration spatiale des danseurs semblent raconter une histoire de voyage et de découverte. La fluidité des mouvements contraste avec la rigidité des structures sociales et politiques, suggérant que l’identité est un flux continu plutôt qu’un état fixe. Les tableaux vivants qui se succèdent évoquent les paysages désertiques, rappelant que l’identité culturelle est aussi un terrain sur lequel on doit constamment naviguer et parfois même lutter pour sa survie.


Axe d’engagement 2: La critique de la notion de frontière

Cherkaoui utilise la danse pour questionner les frontières physiques et métaphoriques qui divisent les peuples et les cultures. Le désert, élément central de «NOMAD», symbolise à la fois l’infini et le vide, la liberté et l’isolement. Dans cet espace ouvert mais hostile, les danseurs explorent les limites entre l’appartenance et l’exclusion. Leur interaction sur scène reflète les tensions entre globalisation et particularismes locaux, entre le désir d’unification et la réalité des clivages sociaux.



Analyse de la chorégraphie «NOMAD»

La chorégraphie s’articule autour de duos et de groupes qui se forment et se déforment, illustrant le concept de frontière en perpétuelle redéfinition. Les corps se touchent, se repoussent, s’unissent et se séparent, créant une métaphore de la cohabitation humaine. Les mouvements sont tantôt harmonieux, tantôt discordants, reflétant les complexités des interactions sociales dans un monde où les frontières sont à la fois omniprésentes et obsolètes.


Axe d’engagement 3: La résilience face à l’adversité

«NOMAD» rend hommage à la capacité humaine d’adaptation et de résilience. Cherkaoui compare les danseurs à la flore désertique qui parvient à s’épanouir malgré les conditions extrêmes. Cette analogie souligne la force de l’esprit humain face aux défis politiques et sociaux contemporains. La danse devient ainsi une forme de résistance, un moyen pour les individus de maintenir leur intégrité culturelle face aux pressions homogénéisantes.



Analyse de la chorégraphie «NOMAD»

Les séquences chorégraphiques alternent entre tension et relâchement, évoquant le cycle de luttes et de repos inhérent à la condition humaine. Les danseurs incarnent cette résistance par leur capacité à rester debout, malgré les forces qui semblent les pousser à terre. La gestuelle est parfois abrupte, parfois fluide, mais toujours empreinte d’une détermination qui défie les obstacles.


«NOMAD» de Sidi Larbi Cherkaoui est bien plus qu’une performance artistique; c’est une réflexion profonde sur l’identité culturelle et la condition humaine dans un monde globalisé. La danse y est utilisée comme un outil puissant pour critiquer, questionner et finalement célébrer la diversité humaine. Elle nous rappelle que malgré les défis sociaux et politiques auxquels nous sommes confrontés, il existe une langue universelle capable de transcender nos différences : celle du mouvement.et de prise de conscience, reflétant les préoccupations majeures de notre époque et plaçant l’artiste au cœur des débats sociétaux.

Activité 2 - Créations autour du No Manifesto d’Yvonne Rainer 

Consignes

À partir du texte « No Manifesto » d'Yvonne Rainer ,

  1. Sélectionnez un des slogans et créez un solo d'une minute qui exprime l'engagement sous-jacent à travers le mouvement.
  2. Réinvestissez et transformez les différents solos en les intégrant dans un processus de composition collective afin de construire une création chorégraphique commune.
  3. Complétez le tableau proposé.

« Non au grand spectacle,

Non à la virtuosité

Non aux transformations et à la magie et au faire-semblant

Non au glamour et à la transcendance de l’image de la vedette

Non à l’héroïque

Non à l’anti-héroïque

Non à la camelote visuelle

Non à l’implication de l’exécutant ou du spectateur

Non, au style

Non au kitsch

Non à la séduction du spectateur par les ruses du danseur

Non à l’excentricité

Non au fait d’émouvoir ou d’être ému »

No manifesto, Yvonne Rainer, 1965

Selection de ma phrase du «No Manifesto» :
Pourquoi avoir choisi cette phrase?
Analyse de la phrase choisie
Comment vais je traiter ces idées par le corps, l’espace, le temps et le flux dans mon solo
Analyse du groupe de mon solo et recyclage par le groupe de nos travaux individuels

Discussion sur «Le No Manifesto» de Yvonne Rainer et les actions du Judson Dance Theatre en tant que remise en question des conventions de la danse.

La danse comme reflet des tensions sociales : l’engagement du Judson Dance Theater


Dans le contexte bouillonnant des années 60, marqué par la guerre du Vietnam, le mouvement des droits civiques et une remise en question généralisée des structures de pouvoir, le Judson Dance Theater a émergé comme un espace d’expérimentation artistique radicale. Cet engagement s’est notamment matérialisé dans la danse, utilisée comme un outil de critique sociale et politique.

Axe 1 : La déconstruction des normes esthétiques comme critique de la société de consommation


Le «No Manifesto» d’Yvonne Rainer peut être interprété comme une attaque contre l’esthétisation de la vie quotidienne par la société de consommation. En refusant le spectacle, le virtuose et le surnaturel, Rainer rejette les valeurs d’une société obnubilée par l’image et la performance. Dans un monde où l’apparence est reine, le «No Manifesto» apparaît comme un acte subversif, remettant en cause les fondements mêmes de la société américaine de l’époque.



Axe 2 : L’accessibilité et la démocratisation de l’art comme réponse à l’exclusion sociale


Le Judson Dance Theater a également œuvré pour rendre la danse accessible à tous, en s’opposant à l’élitisme du monde de l’art. En intégrant des éléments de la vie quotidienne dans leurs chorégraphies et en ouvrant la scène à des non-danseurs, les artistes du Judson ont milité pour une forme d’art inclusive. Cette démarche reflète les luttes pour l’égalité des droits qui traversaient alors les États-Unis, faisant écho aux combats contre la ségrégation raciale et pour les droits des femmes.



Axe 3 : La réification du corps comme métaphore de la résistance politique


Enfin, en faisant du corps un objet plutôt qu’un vecteur d’émotions, les chorégraphes du Judson Dance Theater ont posé un acte politique fort. Dans une période où le corps est politisé, notamment à travers la conscription pour la guerre du Vietnam et les débats sur l’avortement, traiter le corps comme une matière première neutre est une forme de résistance. C’est une manière de reprendre le contrôle sur le corps, en opposition aux tentatives d’appropriation par l’État ou les institutions.



En conclusion, le Judson Dance Theater, à travers le «No Manifesto» d’Yvonne Rainer et ses nombreuses actions artistiques, a su utiliser la danse comme un outil de critique sociale et politique. Au cœur d’une période de profonds bouleversements, ces artistes ont défié les conventions, proposant une vision de l’art engagé qui continue d’influencer les générations futures.

© photographie Babette Mangolte

Yvonne Rainer

Réduire le geste, réifier le corps : une approche minimaliste de la chorégraphie, Par Eléa Dargelos

Dans le New York tumultueux et agité des années 1960, quelques danseurs-chorégraphes se réunissent sous l’intitulé de Judson Dance Theater (1962-1964) afin d’expérimenter de nouvelles manières de danser. À rebours des codes de la danse classique et des principes de la danse moderne, Steve Paxton, Simone Forti, Yvonne Rainer et Trisha Brown élaborent un répertoire de formes singulier, avec l’idée que tout geste peut être de la danse. Cette redéfinition de l’art chorégraphique prend rapidement le nom de « danse post-moderne » pour désigner un mode de composition libéré des carcans traditionnels où l’artiste, dénué de toute émotion et de toute subjectivité, se borne à assembler de façon sérielle ses mouvements comme des matériaux.

Capable de transcender nos différences : celle du mouvement et de prise de conscience, reflétant les préoccupations majeures de notre époque et plaçant l’artiste au cœur des débats sociétaux.

À l’aube des années 1960, dans le contexte d’une remise en question radicale des dispositifs de la création artistique, l’école expérimentale du Judson Dance Theater, encore informelle, cherche à mettre à plat les formes et les définitions de la danse. À la volonté d’atteindre un idéal, Steve Paxton (né en 1939), Simone Forti (née en 1935), Yvonne Rainer (née en 1934) et Trisha Brown (1936-2017) confrontent le désir de se concentrer sur les caractéristiques formelles du mouvement et de le considérer pour lui-même, autotélique, détaché de tout référent. C’est au cours de leur formation au sein du prestigieux studio de Merce Cunningham (1919-2009) qu’ils s’adonnent pour la première fois à cet exercice dans l’atelier de composition chorégraphique du compositeur Robert Ellis Dunn (1928-1996). Suivi à la fois par des musiciens, des plasticiens et des danseurs, le cours favorise l’interdisciplinarité, faisant figure de « plateforme d’échange pour des structures dérivées de diverses sources de l’action contemporaine : danse, musique, peinture, sculpture, happenings, littérature. » (Sally Banes, Democracy’s Body : Judson Dance Theater, 1962-1964, 1993).

Après deux ans d’intenses recherches chorégraphiques, l’expérience collective initiée dans le cadre de l’atelier de Dunn se concrétise. Le 6 juillet 1962, les élèves donnent leur premier « Concert de Danse », une série de seize performances exécutées à la Judson Memorial Church située à Washington Square à New York, au cœur du quartier étudiant. Cet événement inaugural marque l’avènement d’une avant-garde chorégraphique qui déplace la danse dans de nouveaux registres, opérant une fusion avec la vie quotidienne.

Très vite, des approches inédites du geste sont mises au point dans le laboratoire du Judson. L’improvisation, l’accumulation, la répétition, le travail par juxtaposition et le collage remplacent les notions de virtuosité et de fluidité pour laisser la place aux principes de radicalité et de réduction qui forgent un nouveau vocabulaire. La danse se conçoit alors comme une activité propre à l’esthétisation de mouvements simples et authentiques, comme la marche ou la course. Dans sa pièce We Shall Run de 1963, la danseuse et chorégraphe américaine Yvonne Rainer s’inspire d’une source extra-chorégraphique, le sport, auquel elle emprunte le dynamisme, seul matériau de sa danse. Pour effectuer une simple course de groupe, elle convoque sur scène danseurs professionnels et non-danseurs – parmi lesquels Robert Rauschenberg et Robert Morris –, vêtus comme dans la vie de tous les jours, qui ont pour seule instruction de répéter le même mouvement athlétique et de veiller à la constance du rythme. Quelques années plus tard, avec The Mind is Muscle (1968), une performance pour sept danseurs, le langage chorégraphique de Rainer atteint son apogée : elle y rend manifeste l’idée d’une tension dynamique entre l’esprit et l’anatomie, entre la pensée et la matérialité.

Dans le sillage de Rainer, Steve Paxton, avec Satisfyin’ Lover (1967), inclut dans son écriture chorégraphique des mouvements pédestres, dépourvus de toute signification, sinon celle qui leur est intrinsèque. Pour cette pièce, il appelle quarante personnes à défiler et à réaliser un module comprenant trois actions différentes issues du quotidien : marcher, s’asseoir et se tenir debout. Il en résulte un large spectre de possibilités posturales qui montre à quel point il est aisé de démystifier la danse et en même temps d’esthétiser la vie.

L’adoption de protocoles chorégraphiques par les membres du Judson Dance Theater révèle à quel point leur esthétique a été proche de l’art minimal. Dans l’élaboration de ce nouveau répertoire gestuel, l’apport des pratiques conceptuelles et processuelles auxquelles se livrent les plasticiens américains dans les années 1960 est fondamental. Travail in situ, renouvellement du rapport avec la perception du spectateur, modules systématiques et protocolaires sont autant de critères de l’art minimal que les danseurs-chorégraphes reprennent à leur compte et incorporent dans leurs créations.



Dans Man Walking Down the Side of a Building (1970), Trisha Brown montre les affinités de son langage chorégraphique avec l’art minimal de son contemporain et ami Donald Judd. Dans la cour intérieure d’un immeuble de six étages, elle s’interroge sur la notion de pesanteur : basculé à la verticale, le danseur évolue sur la paroi de l’édifice en marchant, rappelant les piles, systèmes de modules conçus par le sculpteur. Le corps humain est alors compris comme un objet tridimensionnel ne relevant « ni de la peinture, ni de la sculpture » (Donald Judd, « Specific Objets », Arts Yearbook 8, 1965). Il effectue des mouvements gratuits, se contentant de répéter « une chose après une autre », à l’image des formes parallélépipédiques de Judd. À ce sujet, Trisha Brown confie que « dans cette période d’expérimentation, il y avait une alliance étroite avec les arts plastiques. Et [qu’elle s’est] lancée dans cette quête idéale du corps comme instrument artistique et objet, de la pureté de la forme, pureté de l’action […] » (Entretien de Trisha Brown, Free to Dance, 2001).



Avant la formation du Judson Dance Theater, Simone Forti avait déjà expérimenté l’idée d’une analogie corps-chorégraphie. En 1961, lorsqu’elle présente ses Dance Constructions dans le loft new-yorkais de l’artiste japonaise Yoko Ono, elle explique qu’il est bien question de « danse[s] » mais que celles-ci « peuvent aussi être vues comme des sculptures faites de personnes » (Entretien de Simone Forti pour High Line, à propos de sa pièce Huddle, 2013). Avec cet ensemble de cinq pièces, Forti met au point l’une des premières chorégraphies procédant d’une réification du corps.



Dans le sillage de Rainer, Steve Paxton, avec Satisfyin’ Lover (1967), inclut dans son écriture chorégraphique des mouvements pédestres, dépourvus de toute signification, sinon celle qui leur est intrinsèque. Pour cette pièce, il appelle quarante personnes à défiler et à réaliser un module comprenant trois actions différentes issues du quotidien : marcher, s’asseoir et se tenir debout. Il en résulte un large spectre de possibilités posturales qui montre à quel point il est aisé de démystifier la danse et en même temps d’esthétiser la vie.

L’adoption de protocoles chorégraphiques par les membres du Judson Dance Theater révèle à quel point leur esthétique a été proche de l’art minimal. Dans l’élaboration de ce nouveau répertoire gestuel, l’apport des pratiques conceptuelles et processuelles auxquelles se livrent les plasticiens américains dans les années 1960 est fondamental. Travail in situ, renouvellement du rapport avec la perception du spectateur, modules systématiques et protocolaires sont autant de critères de l’art minimal que les danseurs-chorégraphes reprennent à leur compte et incorporent dans leurs créations.

Une fois cette réflexion inaugurée, les danseurs-chorégraphes du Judson ne cessent de s’interroger sur la nature de leur démarche artistique. Le corps devient purement fonctionnel et impersonnel et la danse est débarrassée de toute justification, affirmant son autonomie. Yvonne Rainer se met alors en quête du « mouvement pur » qui selon elle est « un mouvement qui ne renvoie à rien d’autre » (Anne Livet, Contemporary Dance, 1978). Pour Trio A (1966), elle intervient sur une scène au décor tout à fait dépouillé, effectuant une série de gestes simples sans transition ni fil conducteur. Le même mouvement est répété à cinq reprises, avant qu’un nouveau ne soit introduit dans la suite. Cette réflexion peut faire écho aux évolutions colorées de Brice Marden et notamment au Mur chez Yvon Lambert (1973), au sens où la chorégraphie, tout comme la peinture, n’est que déclinaison d’un même motif sur le même rythme. Avec cette composition, Rainer met en évidence l’aspect conceptuel de la danse, conçue comme un art élémentaire dénué de temps forts.

Ces modules gestuels entrent également en résonance avec ceux de Trisha Brown qui dans Accumulation (1971) cherche aussi à rationaliser sa démarche à travers des gestes répétitifs qui s’apparentent aux méthodes sérielles des sculpteurs et plasticiens minimalistes. La composition est régie par une progression mathématique, qui vient systématiser et rendre objectif le mouvement. Celui-ci est d’ailleurs préalablement croqué ou dessiné sur une partition, graphiquement ou verbalement, afin d’en assurer la précision.


Malgré sa courte période d’existence (1962-1964), le Judson Dance Theater a révolutionné l’histoire de la danse en se détachant nettement des principes fondateurs des danses classique et moderne. Le groupe a réorganisé le vocabulaire commun de la chorégraphie et a redéfini ce qui pouvait être considéré comme un danseur, bouleversant la notion de beauté du geste. Il n’est donc pas étonnant qu’il ait trouvé un prolongement favorable dans la danse post-moderne et qu’il ait irrigué la pensée des chorégraphes jusqu’à la fin des années 1990. Dans le sillage de Steve Paxton, Simone Forti, Yvonne Rainer et Trisha Brown, se sont notamment illustrées les chorégraphes Lucinda Childs (Dance, 1979) et Anne Teresa de Keersmaeker (Rosas Danst Rosas, 1997) aux compositions puristes, fidèles à la puissance créatrice de la bande du Judson Dance Theater.

En quoi «Ceremony of Us» d’Anna Halprin est une tentative de guérison des divisions raciales par la collaboration artistique?

"Car dans cette représentation au Mark Taper le 27 février, il y aura un nombre égal de noirs et de blancs. Quel type de partenariat peut naître de ces conditions entre public et interprète, entre interprètes et entre les membres du public ? La réponse réside dans la définition de cette question. Non pas sous une forme préconçue, mais plutôt à travers un processus qui permettrait à chacun de découvrir de manière plus approfondie ses propres sentiments."

Anna Halprin, notes de performance pour Ceremony of Us

Partie 1 : La réponse artistique aux tensions raciales de l’époque


Dans le contexte social tumultueux de la fin des années 1960, marqué par les émeutes de Watts et la lutte pour les droits civiques, «Ceremony of Us» d’Anna Halprin se présente comme une tentative audacieuse de guérison des divisions raciales. Cette performance a été conçue dans un moment où les États-Unis étaient profondément divisés par des questions de race, et la nécessité de créer des espaces de dialogue et de compréhension mutuelle était criante. Halprin, conscient de l’impact de l’art sur la société, a cherché à utiliser la chorégraphie comme un moyen de rapprochement entre les communautés noires et blanches.


La chorégraphie de «Ceremony of Us» engageait les danseurs dans une série de mouvements qui reflétaient les dynamiques de pouvoir et les préjugés raciaux. En gardant les groupes séparés avant de les réunir, Halprin a mis en scène le processus d’intégration raciale, symbolisant ainsi les étapes nécessaires pour surmonter la ségrégation. Les mouvements constitués pour chaque groupe avaient pour mais de refléter leurs expériences uniques, et leur union sur scène représentait une vision idéalisée de l’harmonie possible entre les races.



Partie 2 : Les ateliers de confrontation raciale comme fondement de la collaboration


Les ateliers de confrontation raciale à Esalen ont fourni un cadre thérapeutique où les participants ont pu exprimer et explorer leurs sentiments sur la race. Ces ateliers étaient essentiels pour préparer les danseurs à travailler ensemble, leur permettant d’aborder la performance avec une compréhension plus profonde des expériences vécues par l’autre. Halprin a utilisé ces ateliers comme base pour développer une chorégraphie qui non seulement présentait les différences raciales mais cherchait également à les transcender.

Dans «Ceremony of Us», la chorégraphie était imprégnée des émotions brutes et des vérités révélées lors des ateliers. Les mouvements étaient conçus pour amener les danseurs à interagir physiquement, dépassant ainsi le verbal pour atteindre un niveau de communication plus instinctif et empathique. Cette approche a permis d’aborder des sujets difficiles de manière non verbale, facilitant une forme de guérison que les mots seuls ne pouvaient pas atteindre.




Partie 3 : La performance comme réflexion et guérison communautaire


La performance finale, présentée au public, n’était pas seulement une démonstration artistique, mais aussi un acte communautaire de guérison. «Ceremony of Us» a offert aux spectateurs une expérience immersive où ils étaient confrontés à leurs propres préjugés et invités à considérer la possibilité d’une société intégrée. La chorégraphie ne se contentait pas d’illustrer la rencontre interraciale, mais cherchait à activer chez les spectateurs un désir de changement social.


Les moments de la performance où les danseurs noirs et blancs interagissaient intimement étaient particulièrement puissants, défiant les normes sociales et les tabous. En présentant ces interactions dans un contexte artistique, Halprin a pu explorer des territoires qui auraient été trop controversés dans d’autres sphères publiques. La performance s’est terminée par une image d’unité, avec tous les danseurs épuisés mais ensemble, suggérant que malgré la difficulté du processus, une communauté harmonieuse était possible.




En conclusion, «Ceremony of Us» d’Anna Halprin était bien plus qu’une œuvre artistique ; c’était une intervention sociale qui a utilisé la collaboration artistique comme un moyen de guérison des divisions raciales. À travers la chorégraphie, les ateliers préparatoires et la performance elle-même, Halprin a offert un modèle pour aborder et peut-être surmonter certains des défis raciaux les plus persistants de la société.

Activité 3 - Atelier Léonie MBaki

Consignes

  1. Explorer l'univers du Krump en découvrant son histoire, ses codes et son expressivité.
  2. S'initier à des éléments techniques fondamentaux propres à cette danse, afin de développer une gestuelle authentique et engagée.
  3. Créer une chorégraphie collective en s'appuyant sur les éléments transmis par Léonie M'Baki, en intégrant à la fois l'énergie du Krump et une réflexion sur son impact artistique.

Œuvres de référence :

  • Éloge du puissant royaume – Eddy Maalem
  • Rize – David LaChapelle


Examen du krump, une danse née des rues de Los Angeles, comme expression puissante des expériences des communautés marginalisées.

Le krump, une danse explosive et expressive née dans les rues de Los Angeles, est un puissant vecteur d’expression pour les communautés marginalisées. Voici une analyse en 600 mots, divisée en trois parties.


Première partie: Origines et contexte socio-culturel du krump


Le krump est né au début des années 2000, dans un contexte de violence, de pauvreté et de tensions raciales à Los Angeles. Ce style de danse est issu des «dance battles» qui offraient une alternative à la violence des gangs, permettant aux jeunes de s’exprimer et de libérer leur frustration de manière créative et non-violente. Le krump devient alors une forme de résistance face à l’oppression et une quête d’identité pour ceux qui se sentent exclus de la société américaine.


L’engagement du krump dans ce contexte est celui d’un exutoire émotionnel. Il offre un espace pour que les frustrations et les émotions puissent être exprimées de manière brute et sans filtre. Les mouvements saccadés et puissants du krump, tels que les «stomps» et les «chest pops», symbolisent le refus d’être réprimé et la lutte pour être entendu. Cela reflète la situation des communautés marginalisées qui cherchent à affirmer leur existence et à revendiquer leur place dans la société.

Deuxième partie: Évolution du krump et sa réception institutionnelle


En vingt ans, le krump a évolué d’une danse de rue à un art performé sur des scènes prestigieuses. Cette transition vers la reconnaissance institutionnelle est significative. Elle témoigne d’une certaine acceptation des formes d’art émanant des communautés marginalisées, mais elle soulève également des questions sur l’appropriation culturelle et la commercialisation.


L’axe d’engagement ici est celui de l’empowerment. Le krump devient un moyen pour les danseurs de s’affirmer non seulement au sein de leur communauté mais aussi sur la scène mondiale. Des projets comme la «Danse du grand calumet de la paix» et les «Indes galantes» montrent que le krump peut transcender ses racines urbaines pour dialoguer avec des formes d’art classiques, créant ainsi un nouveau langage artistique qui défie les frontières culturelles et sociales.


Troisième partie: Le krump comme expression spirituelle et politique


Le krump n’est pas seulement une danse physique; il a aussi une dimension spirituelle profonde. Les danseurs parlent souvent d’atteindre un état extatique où ils se sentent connectés à quelque chose de plus grand qu’eux-mêmes. Cette spiritualité peut être vue comme une forme de résilience face aux difficultés quotidiennes des communautés marginalisées.


L’engagement ici est double : spirituel et politique. Spirituellement, le krump offre une forme de guérison et d’évasion. Politiquement, il est un acte de résistance qui conteste les idées préconçues sur la culture des ghettos et les identités noires. Les «buck faces» et les mouvements expressifs du corps sont autant de moyens pour les danseurs de revendiquer leur humanité et de rejeter les stéréotypes imposés par la société.


En conclusion, le krump est bien plus qu’une simple danse; c’est une expression puissante des expériences vécues par les communautés marginalisées. Il offre un moyen de raconter des histoires, de résister à l’oppression et de célébrer l’identité collective. Sa présence sur la scène institutionnelle contemporaine démontre son impact culturel et son pouvoir en tant que mouvement artistique engagé.

Activité 4 - Atelier autour de l’univers de Maguy Marin par Dominique Lainé

Consignes


  1. Regard d’artiste autour de différentes pièces de Maguy Marin 
  2. Expérimentez la pièce «Contrastes» de Maguy Marin transmise par Dominique Lainé


Les pièces de référence : Contrastes, MayB, Grossland, Cendrillon, Coppelia.

MayB, 1981

Cendrillon, 1985

Grossland, 1989

Coppelia, 1993

MayB Coppelia Grossland Cendrillon
Contexte social
Axes d’engagements
Caractéristiques de la pièce
Témoignage Dominique Lainé

Analyse de «Umwelt» de Maguy Marin, reflétant les préoccupations environnementales et les cycles répétitifs de la vie moderne.

MAGUY MARIN, UMWELT

Propos recueillis par Marie Pons

Publié le 3 mars 2023

Umwelt est un mot qui désigne notre milieu, ce qui nous entoure et dont nous faisons partie à la fois, en tant qu’êtres vivants agissant dans le monde. Créée en 2004, cette pièce de Maguy Marin a suscité des réactions virulentes à sa réception. Neuf interprètes y sont engagés dans une ronde incessante, un ballet d’apparitions et de disparitions où chaque action dure une poignée de secondes, avant de laisser place à une autre image. Sur scène, une immense tempête souffle, la musique de Denis Mariotte emplit l’espace sonore, la frénésie gagne les corps qui s’acharnent à continuer à embrasser, fêter, boire, s’habiller, porter… vivre leur quotidien réglé. Une partition millimétrée régit cette écriture chorégraphique exigeante, découpée en vignettes qui sont autant de facettes d’un état du monde qui court à la catastrophe. Entre 2004 et 2023, un monde. Comment relire ce travail avec les remous qui agitent le monde tel qu’il va maintenant, comment la déflagration d’Umwelt résonne avec notre présent ? Entretien.

Depuis sa création en 2004, Umwelt est jouée régulièrement, avec plusieurs distributions d’interprètes. Dans la vie de la compagnie, comment décidez-vous qu’une pièce en particulier continue sa route ?


Lors de sa création en 2004, nous avons joué Umwelt pendant deux ou trois ans puis on l’a arrêtée car sa réception n’a pas trouvé d’écho. Elle a surtout été remarquée et soutenue par des chorégraphes qui, à cette époque, étaient à la tête de Centres Chorégraphiques Nationaux et qui l’ont accueillie, pendant ces deux ou trois années de tournée. Nous l’avons ensuite reprise en 2013 puis en 2021, à la demande de certains lieux. Au moment de la création j’avais une compagnie permanente, ce qui n’est plus le cas aujourd’hui. Maintenant, en tant que compagnie indépendante, nous n’avons pas les moyens de reprendre une telle pièce après son arrêt. Interrompre tout le travail qui est en cours par ailleurs pour reprendre une pièce sans soutien financier n’est bien-sûr pas possible. En 2013, nous l’avions reprise à la demande du Théâtre Garonne à Toulouse, qui nous avait proposé une tournée européenne intéressante. Son directeur Jacky Ohayon trouvait que c’était une pièce importante, comme le Théâtre de la Ville à Paris qui a aussi soutenu la pièce en la programmant sur un temps long. La vie et la tournée d’une pièce, c’est avant tout et d’abord une question de moyens de production. Umwelt est une pièce importante pour moi, mais je peux décider de la reprendre seulement parce qu’il y a une opportunité.

Cette reprise en 2023 s’accompagne de la sortie d’un film réalisé par David Mambouch, Umwelt de l’autre côté des miroirs, qui dévoile les coulisses de la pièce, ce qu’il se passe dans l’envers du décor, où se joue une grande part du spectacle. 


Ce film a été réalisé à notre initiative, avec nos propres forces et dans des conditions modestes, même si nous avons eu heureusement le soutien de la Comédie de Saint-Étienne et du CDN des 13 vents à Montpellier. Lorsque nous avons joué Umwelt à Saint-Étienne nous avions trois jours sur place, David Mambouch a pu venir avec son équipe pour filmer et en profiter pour tourner à ce moment-là. Quant à la tournée 2023 d’Umwelt, comme cela ne faisait pas si longtemps qu’elle avait jouée, le temps de reprise et de répétition a été assez court, ce n’était pas si onéreux, mais c’est à nouveau parce qu’il y a eu une demande et un soutien que l’on a la possibilité de la jouer.


J’aimerais que l’on revienne sur le contexte de création de la pièce en 2004. À ce moment-là, où en êtes-vous en tant que chorégraphe, compagnie, à quoi ressemble l’époque ? 


On est en 2003, après l’annulation du festival d’Avignon en juillet, c’est une situation très difficile pour les intermittents. Il y a chez moi le désir de travailler avec des gens qui ne sont pas forcément des artistes chorégraphiques, avec des comédiens, d’aborder le travail sous un autre angle que celui de la danse, en ayant affaire à des gens dont ce n’est pas le métier. Il y a aussi des éléments qui sont au travail chez moi depuis longtemps : la lecture de Beckett, celle de Spinoza, qui m’accompagne à ce moment-là depuis quelque temps déjà. J’ai aussi en tête le rapport à l’idée que les choses ne s’améliorent pas, que l’on va vers une catastrophe dans une indifférence hallucinante. Il y a eu 2001, une succession d’évènements qui ont alimenté cette impression d’aller à la catastrophe, alors que l’on continue par ailleurs à aller chercher sa baguette de pain, en Europe, en France. Tout semble continuer à fonctionner en apparence alors que les corps tombent, qu’il y a des guerres. Tout est englobé dans la vie comme elle va. C’était ça, le contexte.



Dans le texte que vous avez écrit et qui accompagne la pièce, la notion d’épuisement revient inlassablement au fil des paragraphes. Pendant la création d’Umwelt, à quel moment ce dispositif d’entrées et sorties des danseur·euses qui surgissent et disparaissent derrière des panneaux dans une ronde infinie est apparu ?


J’avais lu chez Deleuze une écriture de moments de vie fugaces, comme un après-midi d’été, des ambiances que l’on vit. Comment capter des instants qui n’ont ni début ni fin ? Pour ne pas avoir de début ni de fin j’avais demandé que l’on travaille avec deux panneaux en carton, un de chaque côté de la scène, qui dissimulaient les entrées et sorties des interprètes, pour essayer d’incarner cette existence d’un moment dont ne voit ni l’initiative ni la conséquence. Deleuze a écrit à propos de Spinoza, dans Spinoza, Philosophie pratique il intitule un chapitre « Spinoza et nous au milieu », ce qui m’avait donné envie d’appeler la pièce ainsi au départ, Nous au milieu. Dans ce texte, il évoque la façon dont Spinoza parle des corps, la façon dont ils affectent et sont affectés, et il compare Spinoza à l’éthologue et philosophe allemand Jakob von Uexküll, qui a écrit Mondes animaux et monde humain, un texte que j’ai aussi adoré lire. Mon objectif était d’arriver à rendre des ambiances, à partager comment le hasard de la vie, les endroits où l’on est, où l’on naît, nous façonnent, façonnent nos mains par exemple. Comment les corps sont façonnés par les habits qu’ils portent, par leur milieu social, par un tas de données en réalité. Tout en disant que l’on fait partie d’une même espèce, avec une multitude de singularités. Quant à la question de l’épuisement, elle est amenée par ma lecture de Beckett, par la façon dont il épuise une chose avant d’en proposer des variations. Dans Cap au pire par exemple, il utilise très peu de mots, peut-être 500 en tout, avec lesquels il écrit une nouvelle. Il épuise les possibilités d’une idée, c’est une question de réorganisation du langage. Il y avait tout cela dans l’air et dans ma tête au départ, parmi les matières que j’ai partagées avec les interprètes et avec le musicien Denis Mariotte.




Cette scénographie, avec la présence de panneaux en fond de scène qui permettent l’apparition et la disparition des danseur·euses structure le rythme de la pièce et la chorégraphie, et c’est une écriture que l’on retrouve dans les pièces suivantes, Turba, Nocturnes… comme une façon d’écrire sur laquelle vous insistez.


Disons que j’ai commencé avec Umwelt à travailler l’écriture chorégraphique comme un montage. Au lieu de travailler chronologiquement du début à la fin de la pièce dans une sorte de logique, je l’ai découpée en centaines de vignettes, qui n’ont pas forcément de rapport entre elles mais qui travaillent sur une diversité d’expressions à partir d’un endroit commun. Ce travail a effectivement perduré ensuite avec Nocturnes, Turba, Salves, à partir de l’idée d’un montage de moments capturés au milieu de la vie, sans début ni fin, de moments juste donnés à voir comme ça, sans autre explication.

En même temps, ces moments doivent aller contre la tempête qui souffle sur le plateau, qui contraint et malmène leur existence même. La composition musicale amène aussi une perturbation, il y a dans Umwelt presque un rempart de son qui impacte les deux côtés, public et danseur·euses, et qui plonge les interprètes dans un degré de difficulté supplémentaire pour tenir la partition. 

Nous n’avons pas commencé par nous dire qu’il y aurait une tempête, tout comme nous n’avons pas commencé par les panneaux de fond. Nous avons commencé par réunir des matières humaines et poétiques, c’est elles qui se sont accumulées. Ensuite seulement il s’est agi de faire le montage à partir d’elles, et le besoin d’avoir des endroits d’apparitions et de disparitions, d’avoir plusieurs panneaux est arrivé. Nous avons choisi leur matière, en l’occurrence le miroir qui nous a semblé proposer comme un mirage en fond de scène. L’idée de tempête est venue de la lecture de Spinoza, comme la présence d’un vent de catastrophe qui est en train d’arriver alors que l’on continue à vivre nos vies. Il fallait que les gestes des interprètes soient empêtrés, qu’il y ait une difficulté à continuer malgré tout sa petite vie. La musique de Denis Mariotte a participé à créer une sorte d’ambiance où l’on ne s’entend plus. Il y a une espèce de fureur qui existe tout autour et nous continuons malgré tout à boire notre café. 

Par rapport à l’existence de cette tempête qui souffle, la situation des actions qui ont lieu en fond de scène, l’intensité musicale, est-ce que vous aviez conscience de créer une distance physique avec le public ? Je me demande en quoi celle-ci a pu être un facteur qui a joué dans la réception violente de la pièce en 2004.


Au départ, cette distance a été pensée comme un horizon, comme un futur qui se discerne au loin mais qui semble tellement éloigné que l’on n’y croit pas C’est exactement ce qu’il continue de se passer aujourd’hui malgré des situations intenables plus proches de nous engendrant inégalités sociales et discriminations: on voit le futur se dessiner à l’horizon, mais on a l’impression que c’est trop distant pour que cela nous affecte vraiment. Comme s’il fallait que l’on reçoive quelque chose sur la tête pour comprendre que la situation du climat, est en train de nous foutre en l’air. Il n’y a que celles et ceux qui subissent de plein fouet la misère, les tsunamis, les tremblements de terre ou la désertification, qui sont en plein dedans. Nous ici nous commençons à en prendre un peu conscience, mais ces phénomènes restent suffisamment lointains pour que nous ne les prenions pas trop au sérieux. Pour moi, c’est ce que représentait l’éloignement de la pièce par rapport au public. Et aussi le fait tout bêtement que l’on jette des matières, des pierres, des objets et qu’il fallait pouvoir les projeter vers l’avant sans qu’ils tombent sur la tête des spectateur·ices au premier rang !




Pour bien comprendre, qu’est-ce qui semblait insupportable dans Umwelt au point que certains spectateur·ices quittent la salle en hurlant, s’autorisent à monter sur le plateau, invectivent les danseur·euses ? 


Ce qui a beaucoup énervé certaines personnes à mon sens c’est que la pièce soit constituée comme un mouvement continu, entêtant, qu’il ne se passe rien d’autre que ce qui est en train de se passer. Je crois que beaucoup de personnes, et d’amateurs de danse en particulier, n’ont pas supporté ça. C’est arrivé qu’on entende crier dans la salle « Vive le ballet ! ». Umwelt ne dansait pas assez à leur goût, c’était répétitif, il n’y avait pas la patience de voir en quoi une évolution existe entre le début et la fin de la pièce, parce qu’il y en a une, mais elle n’est pas événementielle. C’est comme le vieillissement, on ne se rend pas compte tout de suite que l’on devient vieux, mais on le devient pourtant, on le voit soudain un jour en regardant une photo de soi qui date un peu. C’est souvent comme ça, on ne se rend pas compte que les choses sont en train de changer… Il y a cette histoire que j’aime bien, celle de la grenouille que l’on met dans une casserole d’eau froide, que l’on place sur le feu. Elle ne se rend pas compte qu’elle se fait cuire, alors que si on la plongeait dans l’eau chaude directement elle sauterait automatiquement de la casserole. Il y a une sorte d’accoutumance lente aux évènements, qui fait qu’on ne se révolte plus.





En tant que compagnie, quelle a été votre réaction par rapport à la virulence de ces retours ? Comment avez-vous vécu le fait de proposer un travail qui s’attaque à la catastrophe collective et partagée par les espèces vivantes sans trouver d’écho chez vos pairs ?


Ça a été une grosse colère. Une colère qui continue aujourd’hui d’ailleurs, puisque des forces réactionnaires s’expriment, y compris dans les salles de spectacle. Quand on me dit « Vive le ballet » j’ai envie de répondre « Mais allez voir le ballet alors, changez de salle.» Je suis en opposition avec des gens qui réagissent de cette façon. C’est politique, il y a eu tout un moment où le public, parce qu’il paye sa place, s’est senti dans une position de consommateur et en pouvoir de commander ce qu’il aurait envie de voir ou comment il aurait envie de le voir. Je crois que ce rapport a un peu changé maintenant, mais je n’en suis pas sûre. Le public de la danse n’est pas exempt de réactions violentes, réactionnaires, extrêmes.

En 2004, politiquement c’est aussi les années Sarkozy, le début d’une parole décomplexée.


Oui, c’est la France décomplexée, on commence à dire ouvertement que l’on est racistes au nom d’une prétendue liberté d’expression, y compris dans une salle de spectacle. On s’octroie le droit de monter sur le plateau, comme si ce n’était pas un métier, une exigence d’être là. Ce sont des métiers, les artistes ne sont pas des espèces de guignols qui amusent la société.


Est-ce que des réactions comme celles-ci se sont atténuées au fil des années ? 


Pas vraiment. J’ai fait Ha Ha ! en 2006 qui n’a pratiquement pas tourné comparé au reste de mes pièces. Je l’apprécie mais elle a été peu vue, alors que, pour moi, elle reste une pièce très actuelle. J’ai passé mes nerfs avec cette pièce-là et j’ai pu donner forme à cette colère. Ensuite, avec Turba, des gens sont montés sur le plateau, il y avait souvent du raffut dans la salle, la pièce était parfois interrompue en cours de représentation et il m’est arrivé de demander à des spectateur·ices de sortir et de nous laisser travailler. Il y a eu aussi des incidents avec Description d’un combat, pour Nocturnes certaines personnes ont trouvé que j’étais fainéante et que je ne faisais pas assez travailler mes danseur·euses… J’allais dire que c’est plus calme récemment, mais même l’année dernière avec Y aller voir de plus près, je me suis fait presque insultée par des spectateur·ices qui disaient qu’ils avaient leur place à la Comédie française – et qu’ils s’y connaissaient donc, que mes interprètes étaient nuls, etc, des commentaires hallucinants. Mais on le voit bien dans la société, ce n’est pas que dans les salles de spectacle que ça se passe, on voit des attaques très claires contre les institutions démocratiques républicaines ces derniers mois, au Brésil ou aux États-Unis. Il y a une arrogance fascisante qui fait très peur et qui était déjà sensible dans le public de la culture depuis plusieurs années.





Alors est-ce que vous vous posez la question du cadre du théâtre comme endroit où partager le travail, comment il pourrait en être autrement ?

La question économique est prégnante avant tout, j’insiste là-dessus, il faut que les gens mangent. On travaille avec des interprètes qu’il faut rémunérer. Et qui peut payer les cachets ? Les lieux subventionnés qui ont encore un peu d’argent à mettre dans la création et la production. Nous allons jouer là dans les lieux qui nous font vivre, car c’est seulement ainsi que l’on peut continuer à travailler. Bien entendu nous avons d’autres accroches avec des lieux amis mais les conditions du partage y est plus précaire. Ici, à Ramdam (ancienne menuiserie située à Sainte-Foy-lès-Lyon acquise en 1995 par la compagnie de Maguy Marin. La compagnie y est installée de manière permanente depuis 2015 avec d’autres artistes compagnies, ndlr), le lieu a une jauge de 150 personnes, on y joue et c’est important, mais ça ne constitue pas le gagne-pain des interprètes, de l’équipe. Et puis continuer à défendre cette rencontre entre un public et une œuvre dans un lieu institutionnel, ça me semble très important. Nous avons à nous battre pour occuper des espaces publics qui sont réfractaires.

Reprendre Umwelt en 2023 va aussi probablement offrir d’autres réceptions, lectures du travail, entourées des problématiques climatiques plus prégnantes qu’en 2004 malgré tout, accompagnées par toute la littérature philosophique sur le vivant qui a circulé ces dernières années.


Oui, la réception a déjà changé au fil du temps, depuis 2013 notamment, bien sûr. De la même façon que lorsque l’on a créé May B en 1981 les gens partaient, alors que les salles sont pleines à présent et que tout le monde regarde cette pièce avec une sorte de respect. Les regards changent. Il y a souvent un décalage au moment où une œuvre apparaît, une forme d’accord arrive plus loin dans le temps en termes de réception. C’est vrai pour tous les mouvements d’art si l’on y réfléchit, quand les peintres ont décidé de ne plus dessiner selon certaines conventions ça n’a plu à personne, c’est toujours comme ça. On traverse ces moments dans l’histoire du cinéma, de la musique, chaque fois qu’il est question d’inventer une autre façon de faire, de proposer un autre regard.





En parlant d’actualité et de rapport à l’histoire, en pensant à Spinoza, Lucrèce, aux textes anciens qui irriguent votre travail, il y a face à votre écriture chorégraphique comme le sentiment d’avoir perdu un fond commun, un endroit d’ancrage par rapport à notre humanité. Ça fait sens si je le formule ainsi ?


Ça fait sens bien sûr. Je pense à Walter Benjamin, qui a écrit Thèses sur le concept d’histoire. Je n’avais pas lu ces textes avant de faire Umwelt, c’est un étudiant qui m’a suggéré cette lecture un jour. Dans la treizième thèse Benjamin évoque un tableau de Paul Klee où l’on voit un ange, L’Angelus Novus, qui a les ailes déployées. Il y a une tempête qui souffle devant lui, qui le fait reculer vers le futur, le passé est devant et il constate, il ne peut que regarder les ruines qui s’amoncellent en face de lui. Benjamin écrit des phrases essentielles à propos du rendez-vous tacite que l’on aurait avec les générations passées. Qu’il y a une interrogation à avoir à propos de ce que les générations passées nous ont léguées, et sur ce que l’on doit transmettre à celles qui vont venir. Cette idée de transmission est très forte, se demander quoi transmettre l’est aussi, comme une certaine vision de la relation humaine, la responsabilité que l’on a les uns envers les autres. Levinas en parle aussi, de la responsabilité que l’on a envers l’autre, une responsabilité sans culpabilité, simplement parce que nous sommes là, nous existons. C’est très fort comme pensée je trouve. 



Activité 5 - Activité de création

Projet chorégraphique : « L’art engagé en mouvement »

À partir de votre expérience pratique, réalisez une création chorégraphique collective d’une durée minimale de 3 minutes , impliquant l’ensemble du groupe classe et s’inscrivant dans une démarche d’art engagé.


Étapes de travail :

- Déterminez un thème d’actualité qui vous touche et qui servira de fil conducteur à la pièce.

- Réunir un ensemble de ressources documentaires (textes, images, vidéos, témoignages…) pour nourrir et enrichir votre réflexion chorégraphique.

- Élaborer une démarche de création en structurant les étapes d’appropriation et d’expérimentation des mouvements.

- Planifier et organiser les séances de travail , en intégrant :

- Des échauffements adaptés au style et aux intentions de la pièce.

- Des phases de recherche et d’exploration du mouvement.

- Le choix des musiques supports et des principes de composition chorégraphique.

- Rédiger une note d’intention résultant des choix artistiques, du message porté par la chorégraphie et son lien avec l’art engagé.


Contraintes :

Chaque chorégraphe dispose de 2 séances de 2 heures pour mener son travail.

Vous ne danserez pas dans votre propre création , votre rôle étant de guider, transmettre et structurer la pièce.

Répondre à la question suivante: En quoi ma création relève de l’art engagé?


Dossier à réaliser

- La note d’intention

- La problématique abordée

- Mes ressources documentaires

- Les artistes ayant abordé le sujet

- Ma démarche de création

- Les exercices d’échauffements

- Les consignes d’improvisation

- Les consignes de création 

- Mon analyse de la création


Thémes au programme

- La danse et les avancées scientifiques et technologiques

- La danse et les biens culturels de consommation 

- La danse et les questions d’identité

- La danse et les questions d’écologie

- La danse et les questions interculturelles

La note d'intention

Qu’est ce qu’une note d’intention?

Dans le domaine de la danse, la note d’intention est une composante essentielle pour donner vie à une chorégraphie, transmettre une vision artistique et susciter l’intérêt des publics cibles, des producteurs et des collaborateurs potentiels.

Au cours de cetteactivité, nous allons explorer en profondeur ce concept, de sa définition à son rôle fondamental dans la mise en valeur d’une production de danse. Nous allons étudier la manière dont la note d’intention peut être utilisée pour captiver les spectateurs, transmettre des émotions, et présenter les objectifs artistiques et techniques d’une performance chorégraphique.

Comment la note d’intention devient une pièce maîtresse pour faire rayonner une chorégraphie?

Définition de la Note d’Intention :

La note d’intention est un document essentiel dans le domaine de la danse, décrivant la vision artistique, les thèmes, les émotions et les objectifs d’une chorégraphie. Elle est destinée à transmettre ces aspects à un public spécifique, des producteurs ou des collaborateurs potentiels.

La note d’intention du ballet «Le Lac des Cygnes» de Tchaikovsky explique comment la dualité du cygne blanc et du cygne noir est utilisée pour représenter l’opposition entre le bien et le mal, et comment cette lutte est chorégraphiée pour capturer l’essence tragique de l’histoire.

Objectifs de la Note d’Intention :

Transmettre une vision artistique claire et précise, susciter des émotions spécifiques chez le public, et présenter les objectifs techniques et artistiques du spectacle.

La note d’intention du ballet «Giselle» de Jean Coralli et Jules Perrot explique comment la chorégraphie, en utilisant des pas de deux élaborés, cherche à illustrer la fragilité de l’amour et la transition de la vie à la mort.

Importance de la Note d’Intention

Importance pour les Artistes :

Elle aide les danseurs, chorégraphes et autres artistes à comprendre et interpréter la vision artistique derrière chaque mouvement chorégraphique.

Dans la compagnie de danse contemporaine Rosas, la note d’intention pour la pièce «Rain» de Anne Teresa De Keersmaeker met l’accent sur la répétition constante des mouvements pour représenter la métaphore de la persévérance malgré l’adversité.

Importance pour les Producteurs et le Public 

Elle permet aux producteurs de saisir la direction artistique du spectacle et aide le public à comprendre l’intention derrière la performance.

La note d’intention du spectacle «Riverdance» explique comment la fusion de la danse traditionnelle irlandaise avec des éléments de danse moderne vise à célébrer la culture irlandaise et à captiver un large public, même au-delà des frontières culturelles.

Vision Artistique

Comment exprimer et transmettre la vision créative derrière une chorégraphie ?

La vision artistique d’une chorégraphie est la clé pour définir la direction et l’essence de la performance. Dans la note d’intention de «Pixel», Merzouki met l’accent sur la création d’un univers visuel où les danseurs interagissent avec des projections numériques. La vision artistique est centrée sur l’idée d’intégrer des éléments technologiques pour transcender les frontières entre la danse contemporaine et les nouvelles technologies. L’objectif est de créer une expérience immersive et futuriste, où les mouvements hip-hop traditionnels se combinent avec des effets visuels numériques pour captiver un public moderne et connecté.

Les chorégraphies de «Pixel» expriment cette vision à travers des séquences où les danseurs interagissent avec des formes et des animations projetées, créant un mariage entre la physicalité du mouvement corporel et les éléments visuels générés par ordinateur. Cette union entre la danse contemporaine et la technologie offre une nouvelle perspective artistique, où les danseurs explorent de nouveaux horizons esthétiques tout en conservant l’authenticité des mouvements hip-hop.

La note d’intention de «Pixel» illustre ainsi comment la vision artistique de Merzouki s’exprime à travers une fusion créative, alliant le mouvement corporel à l’innovation technologique pour offrir une expérience visuelle novatrice et immersive au public contemporain.

Lien entre les thèmes, les émotions et la chorégraphie :

La note d’intention doit expliquer comment les thèmes et les émotions sont intégrés dans la chorégraphie. Par exemple, dans la pièce contemporaine «D-Man in the Waters» de Bill T. Jones, la note d’intention souligne comment les mouvements énergiques et fluides représentent la lutte contre l’adversité et l’espoir, reflétant ainsi la résilience de l’esprit humain à travers la danse.

Utilisation du langage, des métaphores et des concepts visuels :

La note d’intention utilise un langage évocateur pour peindre un tableau vivant de la performance. Par exemple, la compagnie de danse «Ailey II» décrit la chorégraphie «Revelations» en utilisant des métaphores qui capturent l’essence émotionnelle de la pièce. Les mouvements de danse sont comparés à des poèmes visuels qui racontent l’histoire de l’espoir et de la foi à travers des images vibrantes et puissantes.

Exemple de note d’intention: Zephyr de Merzouki 

Donner forme à ce qui par définition n’en a pas.

Sculpter à travers le vent où l’ineffable ne peut se conter.

Transformer l’impalpable en une matière concrète à travers la danse.

Faire de l’air une substance que l’on peut dompter.

Porter sur scène un élément naturel et lui donner vie.

Mouvement à l’état pur, le vent n’existe que dans le déplacement.

Une nouvelle approche du plateau pour des danseurs de haut niveau. »




« Le plus beau voyage est celui qu’on n’a pas encore fait’ disait un célèbre navigateur. C’est parce qu’il reste toujours un archipel de possibles à explorer, un ailleurs inconnu où s’émerveiller, que je poursuis cette quête qui me pousse à naviguer de territoires en territoires.

Ici, ce territoire est celui de la Vendée, point de départ d’expéditions mythiques, et plus largement tourné vers un océan d’imaginaires autour de l’apprivoisement de vents et marées.

Artistes ou explorateurs, nous sommes à la recherche d’espaces de liberté avec pour tout bagage nos rêves et notre détermination. L’envie de se lancer dans une aventure singulière et de partager une expérience hors du commun avec le plus grand nombre. Artistes ou funambules des mers, cette ambition nous rapproche.

Entouré de mes fidèles collaborateurs à la musique, la lumière, la scénographie et les costumes, j’ai choisi comme cap pour cette nouvelle création le défi humain face aux forces de la nature, ce qui constitue l’essence même de la vie en mer : un corps à corps avec le vent.

Mourad Merzouki

Organisation de la Note d’Intention pour «Zéphir» de Mourad Merzouki

Structuration : introduction, développement, conclusion :

L’introduction de la note d’intention pour «Zéphir» de Mourad Merzouki débute par une évocation poétique du territoire de la Vendée et de son lien avec l’océan. Cette introduction plonge immédiatement le lecteur dans l’atmosphère et les thématiques explorées dans la chorégraphie à venir.

Le développement de la note d’intention détaille l’idée de quête, d’aventure et d’exploration. Elle expose la volonté de saisir l’essence des forces de la nature, en particulier du vent, et de les traduire en mouvements de danse. Il est mentionné comment l’équipe de création se réunit pour donner vie à cette vision singulière et ambitieuse.

La conclusion de la note d’intention récapitule les objectifs artistiques de la chorégraphie «Zéphir». Elle met l’accent sur la transformation de l’impalpable en une expression concrète par la danse, tout en soulignant la nouvelle approche du plateau pour les danseurs, illustrant ainsi le défi et l’innovation attendus.

Conseils

Répartition équilibrée des informations artistiques et techniques :

Le texte de Mourad Merzouki équilibre habilement les éléments artistiques et techniques. Il dépeint l’essence artistique de la création tout en introduisant les aspects techniques liés au défi de représenter les forces de la nature à travers la danse.


Importance de la clarté et de la cohérence :

La note d’intention pour «Zéphir» de Mourad Merzouki se distingue par sa clarté. Elle utilise un langage poétique pour communiquer des idées complexes de manière cohérente, offrant une compréhension détaillée de la vision artistique et technique derrière la chorégraphie.


Éviter les redondances et les informations superflues :

Le texte évite les redondances et les informations superflues en concentrant chaque paragraphe sur des éléments spécifiques pour offrir une vision complète de la création artistique sans répéter inutilement des concepts déjà exprimés.


Activité 6 - «Co-évaluation»

Sujet: Mon regard critique

A partir de la grille d’évaluation des épreuves «pratique» du baccalauréat, analyser, noter et commenter les créations de vos camarades. 


Ordre de passage Compétences de chorégraphes Compétences d'interprète
Chorégraphie 1
Chorégraphie 2
Chorégraphie 3
Chorégraphie 4
Chorégraphie 5
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